Smartphones :
comment le chinois Huawei a croqué l’américain Apple
Inconnue
du grand public il y a dix ans, la marque chinoise est devenue le deuxième plus
gros vendeur de smartphones dans le monde, devant la firme à la pomme. Et ses
ambitions ne s’arrêtent pas là.
La scène se passe au centre de congrès
ExCel de Londres (Grande-Bretagne), pendant la présentation du Mate 20 Pro, le tout dernier smartphone de Huawei. «
One more… big thing ! », lance Richard Yu, dans un rictus. Ce n’est pas la première fois que le PDG de
la division grand public du géant chinois singe le gimmick de Steve Jobs, le
patron d’Apple, qui avait l’habitude d’annoncer « un truc en plus » à la fin de
ses conférences.
Toiser la firme américaine à la pomme ? Il
y a quelques années, l’idée était impensable. Ce n’est plus le cas. Huawei joue
désormais dans la cour des grands. Elle s’est même payé le luxe de détrôner
Apple, éternel numéro deux des ventes depuis
2010, derrière le coréen Samsung. Elle peut également se targuer d’être la
seule société de l’Empire du Milieu à figurer dans le classement des marques
mondiales les plus valorisées de l’année, selon Forbes, à 8,4 Mds$.
Créé en 1987, à Shenzhen,
en Chine, Huawei Technologies n’est pas une nouvelle venue dans le monde des
nouvelles technologies. Jusqu’à la fin des années 2000, elle fournit du matériel
et des logiciels pour les réseaux des opérateurs mobiles. Elle fabrique aussi
des téléphones mais en sous-marin et laisse le soin à ces mêmes opérateurs
(Bouygues, SFR et Orange) d’y apposer leur marque.
A
l’assaut du géant Samsung
Fort de cette expérience, le « petit »
chinois décide de s’émanciper et lance en France, fin 2009, le U8230, son tout
premier modèle au monde à porter son logo en forme de fleur rouge aux pétales
ouverts. Le challenge est loin d’être gagné. Il faut d’abord s’attaquer à la
notoriété de la marque, inexistante à l’époque, tout en habituant les Français
à prononcer correctement Huawei (il faut dire « wouawai »).
Pour réussir son pari, l’entreprise
investit également massivement pour contrer la mauvaise réputation des
entreprises chinoises, le plus souvent accusées de copier les meilleurs tout en
cassant les prix. Huawei installe ses labos de recherche à travers le monde
pour mieux répondre aux demandes de la clientèle occidentale. En France, la
société emploie des dizaines d’ingénieurs dans quatre centres de recherche dont
un à Paris dédié au design et un autre à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine)
qui se consacre à l’élaboration d’algorithmes.
« L’idée est de miser sur l’innovation, explique François Hingant, directeur marketing produit de Huawei France. En 2013, le Mate 1 était par exemple le premier smartphone à très grand écran. En 2014, le Mate 7 est le premier avec un capteur d’empreinte et le P9, en 2016, le premier avec un objectif conçu avec la marque Leica. »
Bientôt
un premier magasin en France
Avec ses derniers modèles, dont le très
puissant Mate 20 Pro, la stratégie porte ses fruits. « Ce virage, que nous
avons pris il y a quelques années, prouve que nous sommes désormais une
entreprise plus innovante que beaucoup d’autres sur le marché, assène Walter
Ji, président de Huawei Consumer Business Group pour l’Europe. Nous vendons
désormais des smartphones technologiquement supérieurs à la concurrence, mais
au même prix, alors que nous avions auparavant l’habitude de faire aussi bien
mais pour moins cher. »
Huawei n’entend pas se contenter pour
autant de la deuxième place sur le podium. Interviewé par le quotidien allemand
« Die Welt » en janvier 2016, Richard Yu ne cachait d’ailleurs nullement son
ambition : devenir le premier vendeur de smartphones au monde. « Au final, nous
serons le leader du marché, déclarait-il. Peut-être d’ici trois ou quatre ans.
»
Comme ses concurrents, le Chinois développe
son propre circuit de distribution et ouvrira dans quelques semaines son
premier magasin en France… tout près de celui d’Apple dans le quartier de
l’Opéra à Paris. Il en faudra davantage pour battre le géant coréen Samsung. Et
trouver une solution pour vendre ses smartphones aux Etats-Unis, où la marque,
soupçonnée par les autorités de sécurité nationale d’être la tête de pont
d’opérations d’espionnage de l’Etat chinois, reste persona non grata.
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