Les risques de
la chirurgie esthétique en Corée illustrés par le photographe Olivier Culmann
15 septembre 2016
Le photographe français Olivier Culmann expose en ce moment à Paris une
série de clichés inédits sur un thème bien particulier : le boom de la
chirurgie esthétique en Corée, vu à travers une série d’autoportraits. Une
approche artistique originale et un œil acéré sur l’évolution de la société dans
le pays, avec en filigrane ce message inquiétant : le risque que la
pratique de la chirurgie esthétique aboutisse à une population standardisée, du
moins en apparence.
Les
risques de la chirurgie esthétique illustrés par des autoportraits
Un
recours massif à la chirurgie esthétique malgré les risques pour la santé
L’œuvre photographique d’Olivier Culmann est
classée par les spécialistes du genre dans le registre de l’absurde et
du dérisoire. Avec ses récents clichés regroupés sous la dénomination « Conversions », l’artiste français confirme son appétence pour le sujet, tant la pratique outrancière de
la retouche
artificielle en Corée interpelle par
sa quête de (non) sens : malgré les risques que représente la chirurgie esthétique, pourquoi la jeunesse du pays tient-elle à tout prix à modifier son apparence ?
Car c’est un fait actuel, à l’instar de ce qui se passe en Chine, les jeunes Coréens et Coréennes (et les plus âgés également) souhaitent à tout prix transformer leur visage, le plus souvent dans le but de ressembler aux stars occidentales - notamment américaines - de la chanson ou du cinéma.
Un mouvement sociétal de fond qui
a de quoi inquiéter quand on sait que, une fois l’équivalent du baccalauréat en
poche, les jeunes adultes se voient récompensés de leurs efforts sous forme
d’un cadeau
très particulier, malgré son prix élevé :
une opération
de chirurgie esthétique visant à agrandir les yeux, amincir le visage ou rallonger le nez !
Métro
et cliniques
À Séoul comme dans tout
le pays, il faut dire que la pratique semble
définitivement entrée dans les
mœurs. Les couloirs du métro regorgent
de publicités avec des photos d’individus avant/après intervention plastique, en guise d’exemple à suivre pour une génération manifestement en manque de repères. Sans compter certains quartiers
de la capitale où l’on trouve une clinique spécialisée tous les 100 mètres…
Le projet « Conversions »
La série de photographies répertoriées
sous le titre « Conversions » suit
le prolongement d’un exercice débuté en 2014 avec un sujet sur un autre pays oriental,
l’Inde.
Ce dernier est constitué d’images dans lesquelles Olivier Culmanns’utilise
comme sujet afin de reproduire sur sa personne des archétypes et
des modèles fortement prégnants de la société indienne.
Pour « Conversions » et
son étude de la société
coréenne, l’artiste constitue lui-même toujours
son propre
matériau avec pour objectif d’analyser
les formes de
représentation de soi à travers l’objectif d’un appareil.
En se jouant continuellement des
pratiques photographiques
classiques, Olivier Culmann interroge
notre regard
face à l’image et crée un socle informationnel
propice à une réflexion
sociétale à plusieurs niveaux :
celui de la chirurgie
esthétique et de ses risques potentiels
en fait partie.
L’approche stylistique d’Olivier Culmann
Une auto mise en scène
Le postulat théorique d’Olivier Culmann est
intéressant dans la mesure où il repose sur le parti pris d’inverser les procédés et
les habitudes observés en Corée.
Avant de se faire opérer, les gens ont l’habitude de proposer à
leur chirurgien esthétique des photos
de leurs modèles occidentaux, auxquels ils
souhaitent ardemment s’identifier.
Le photographe français a
donc soumis trois de
ses portraits (un de face et deux de profil) à une
clinique en lui demandant de lui fournir la simulation d’une transformation de son visage… par rapport à la morphologie de deux acteurs très
en vogue du cinéma
sud-coréen : Jang Dong-Gun et Hyun-Bin !
Les médecins et spécialistes coréens lui
ont retourné les clichés
élaborés et modifiés par leurs propres soins,
sans omettre de préciser les opérations de chirurgie esthétique,
non dénuées de risques, qu’il serait amené à subir s’il souhaitait ressembler à un véritable acteur coréen…
Le constat d’Olivier Culmann
Les récents travaux d’Olivier Culmann s’inscrivent
parfaitement dans la philosophiedéveloppée depuis le début des années 90 par le collectif « Tendance Floue. »Composé d’une quinzaine
de photographes sillonnant la planète, celui-ci se
veut un laboratoire
d’exploration du monde afin d’ouvrir de nouvelles perspectives et modes de représentation dans le champ de la photographie contemporaine.
Les photos d’Olivier Culmann sont
également riches d’enseignements en ce qui concernent les potentielles dérives et risques liés à la chirurgie esthétique en Corée,
au premier rang desquels ce constat implacable de voir apparaître bientôt
une société composée d’êtres
factices standardisés.
Comme le souligne l’artiste lui-même (cité
par Slate.fr), la perte d’identité se fait menaçante : « À un jeune âge, au moment où ces
personnes sont en train de se construire, elles décident de se créer un visage
et donc une identité personnelle qui, en fait, rentre dans un moule commun et
très formaté. Il y a des visages récurrents que les gens veulent avoir. J’ai
par exemple cru revoir une des femmes de la clinique le lendemain dans le
métro, mais ce n’était pas elle. C’était simplement quelqu’un qui avait eu une
opération tellement similaire que cela donnait l’effet de voir un clone. »
La
série de clichés « Conversions » réalisée par Olivier Culmann intègre
un triptyque (Conversions, Inversions, Intrusions) qui est exposé à la Galerie de la Cité internationale des arts, à Paris, du 30 août au
25 septembre 2016. Elle est présentée dans le cadre de l’exposition « Korea
On / Off ».
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